Papi Corse
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Alopécie

L’alopécie — Comment supporter la perte de ses cheveux (1991)
Témoignage d’un alopécique
‘L’ALOPÉCIE? dites-vous. Je ne me rappelle pas avoir jamais entendu parler de cette maladie.’ Peut-être les personnes qui en sont atteintes sont-elles trop gênées pour vous en parler et le gardent-elles pour elles. Étant moi-même alopécique, laissez-moi vous donner quelques explications.
Essayez d’imaginer quel choc ce serait si vous vous mettiez brutalement à perdre vos cheveux. ‘Comment cela se peut-il? C’est impossible’, pensez-vous peut-être, incrédule.
Plus tard, vous apprenez que vous n’êtes pas seul à souffrir d’alopécie. Ce trouble touche environ une personne sur cent, les hommes comme les femmes. Malheureusement, les traitements s’avèrent souvent inefficaces.
“Après tout, me disent certains, ce ne sont que des cheveux.” Certes. Mais il n’en demeure pas moins que l’alopécie affecte tous les aspects de ma vie et que — ce qui n’arrange rien — on peut difficilement l’expliquer autour de soi, entourée qu’elle est d’une aura de mystère.
En général, il suffit d’évoquer une maladie par son nom pour s’en faire une image mentale. Pas avec l’alopécie. Ses causes ne peuvent être décrites en quelques mots. Par ailleurs, la façon même dont elle frappe — brutalement et sans signes avant-coureurs — prend le malade au dépourvu et ne l’incite guère à en parler. C’est ainsi qu’une personne peut perdre, non seulement ses cheveux, mais aussi sa dignité.
Qu’est-ce que l’alopécie?
L’alopécie est une affection sur laquelle les victimes n’ont aucun pouvoir. Elle n’est pas contagieuse, ce qui signifie qu’on ne peut l’attraper à notre contact. Elle n’est pas mortelle non plus, mais l’humiliation, la frustration et la gêne qui l’accompagnent peuvent engendrer une détresse psychologique difficile à surmonter.
L’alopécie ne désigne pas uniquement la banale calvitie masculine. D’ailleurs, lorsqu’ils définissent l’alopécie, certains d’entre nous préfèrent l’expression “chute de cheveux” au terme “calvitie”.
L’alopecia areata, ou pelade, se caractérise par des plaques d’alopécie isolées sur le cuir chevelu. C’est la forme d’alopécie dont je souffre. En cas de chute de tous les cheveux, on parle d’alopecia totalis ou alopécie totale. Si c’est l’ensemble du système pileux qui disparaît, on a affaire à une alopecia universalis ou alopécie généralisée. Chez certaines personnes, la maladie ne dépasse jamais le stade de la pelade. Chez d’autres, les cheveux repoussent spontanément, sans aucun traitement. Il en est, par contre, qui perdent jusqu’aux cils et aux sourcils, ce qui les expose à des infections oculaires du fait que les yeux ne sont plus protégés de la poussière et de la sueur.
Les causes
Les médecins pensent que la pelade est une maladie auto-immune, c’est-à-dire une réaction allergique dirigée contre certains éléments de l’organisme. Peut-être connaissez-vous mieux l’autre désordre de ce type qu’est le lupus. Prenant à tort les cheveux pour une substance étrangère, le système immunitaire d’un peladique réagit en dépêchant sur place des cellules T (lymphocytes) qui s’agglutinent autour du follicule pileux, l’attaquent et le détruisent. Pendant une période de temps indéfinie, le follicule est incapable de produire un cheveu.
Il existe divers traitements médicaux. Toutefois, dans le meilleur des cas, les résultats sont longs à se dessiner et restent généralement décevants. Ainsi, même si les cheveux repoussent, peut-être seront-ils clairs et extrêmement fins. Par ailleurs, imaginez la déception de celui qui voit son alopécie réapparaître et le traitement qui avait été efficace la première fois être sans effet la seconde. Le malade risque alors de passer d’un médecin à l’autre et d’essayer différents traitements les uns après les autres, ajoutant au fardeau psychologique un fardeau financier.
Le corps médical a longtemps désigné le stress comme le grand responsable de la chute des cheveux. Supprimez le stress, disait-on, et les cheveux repousseront. Cette explication amenait parfois des peladiques à croire à tort qu’ils étaient responsables de leur état ou, comme certains médecins le laissaient entendre, que leur conjoint pouvait être à l’origine de leur stress. On sait aujourd’hui que le facteur émotionnel n’est pas en cause. Un peladique n’a donc aucune raison d’éprouver un quelconque sentiment de culpabilité.
Des défis à relever
Étant donné que la perte des cheveux joue sur l’apparence, il arrive que des alopéciques se trouvent assimilés à certains groupes. Celui qui a peu de cheveux, ou trop peu au goût des autres, et qui les porte courts comme moi risque d’être hâtivement catalogué comme quelqu’un voulant afficher ses opinions politiques ou sociales.
Il n’est jamais facile de trouver un emploi, et ça l’est encore moins pour les alopéciques. Par crainte du SIDA, certains employeurs sont devenus circonspects, interprétant parfois une alopécie partielle ou totale comme une manifestation du SIDA — alors que les deux maladies n’ont bien sûr rien à voir. D’autres s’imaginent que les alopéciques sont sous chimiothérapie.
Parfois, les remarques irréfléchies ou les conseils mal avisés peuvent faire si mal que nous n’osons plus mettre les pieds dehors. Croyant bien faire, certains disent: “À ta place, je ne me tourmenterais pas. Mieux vaut en rire.” Plus facile à dire qu’à faire. Le sage roi Salomon savait que “même dans le rire le cœur peut être dans la douleur”. (Proverbes 14:13.) Compte tenu du fait que l’alopécie peut modifier notre apparence de façon brutale et radicale, nous apprécions qu’on ne nous retourne pas le couteau dans la plaie.
Pourquoi ne pas porter une perruque?
“Pourquoi ne portez-vous pas une perruque? C’est ce que je ferais à votre place”, nous suggère-t-on parfois. C’est oublier que les perruques sont le plus souvent conçues pour les femmes qui, pour des considérations de mode, souhaitent changer de style de coiffure. Elles ne sont absolument pas faites pour être portées sur un crâne chauve. Les perruques à l’usage spécifique des alopéciques coûtent généralement plus cher, et tout le monde n’a pas les moyens d’en acheter une et de l’entretenir.
Les femmes atteintes d’alopécie parviennent plus facilement que les hommes et les enfants à trouver une perruque convenable parce qu’elles disposent d’un plus grand choix de coiffures. Néanmoins, certaines femmes préfèrent porter d’élégants foulards. Pour ce qui est des perruques masculines, la plupart ne font, semble-t-il, pas très naturel. Enfin, il faut décider quand porter la perruque. Tout le temps? Faut-il aussi la mettre lorsqu’on est seul chez soi en cas de visite imprévue? Ainsi, pour un certain nombre de raisons, les alopéciques ne portent pas forcément de perruque. Reste que la majorité des malades perdent leurs cheveux sur des surfaces limitées qui peuvent être cachées par les cheveux restants, ce qui rend inutile l’utilisation d’une perruque.
Que faire?
Il arrive que des alopéciques se renferment sur eux-mêmes et se mettent à vivre en reclus, ne supportant pas l’image qu’ils peuvent donner aux autres. Dans ces moments difficiles, il est important d’avoir une idée précise des priorités de la vie et de se rappeler que c’est ce que nous sommes intérieurement qui inspire du respect à autrui.
Voilà pourquoi je vis au jour le jour, essayant de ne pas me préoccuper outre mesure du lendemain, afin de ne pas me laisser submerger par mon problème. Je vérifie le caractère pratique de cet adage biblique: “Ne vous inquiétez jamais du lendemain, car le lendemain aura ses inquiétudes à lui.” — Matthieu 6:34.
Il est vrai que quantité de gens sont dans des situations bien plus pénibles. Toutefois, les alopéciques manquent souvent de soutien et de compréhension. Avant ces dernières années, ils avaient rarement l’occasion de partager leurs sentiments avec d’autres malades, mais il existe maintenant aux États-Unis tout un réseau d’associations de soutien par l’intermédiaire duquel ils peuvent recevoir l’aide de médecins qualifiés. Ceux-ci se font l’écho des dernières découvertes et dénoncent les vieux mythes.
Parfois, je ne peux m’empêcher de songer combien ma vie pourrait être différente. Pourtant, j’ai le bonheur d’être Témoin de Jéhovah et de pouvoir me dépenser pour aider mes semblables à connaître les magnifiques promesses de Dieu relatives à l’avenir (Révélation 21:3, 4). Je puise également la force d’endurer dans ces paroles de Psaume 55:22: “Décharge-toi sur Jéhovah de ton fardeau, et lui, il te soutiendra.”
Un peladique
L’acteur Humphrey Bogart était peladique. Sa femme, Lauren Bacall, raconte: “Il avait remarqué sur sa joue une petite zone ronde où sa barbe ne poussait pas. Ces zones nues se multiplièrent. Le matin, en se réveillant, il trouvait des touffes de cheveux sur son oreiller. Il s’en inquiéta. Être affligé d’une tonsure, ce n’est pas trop grave pour un acteur, il peut toujours porter un postiche, mais privé de toute couronne de cheveux, il est condamné à la perruque. Plus ses cheveux tombaient, plus il s’angoissait, et plus il s’angoissait, plus ses cheveux tombaient. Dans la dernière scène de Dark Passage, il dut porter une perruque. Du coup il fut pris de panique, c’était son gagne-pain qui était en jeu. Il ne consultait jamais de médecin, mais cette fois, une visite s’imposait. (...) Le docteur diagnostiqua une alopecia areata.”
Les traitements efficaces
  On peut traiter l’alopécie par des injections de cortisone, afin de stopper la crise. La cortisone est une substance qui, en réduisant l’inflammation autour du follicule pileux, favorise son alimentation en sang et en éléments nutritifs.
  Un autre traitement fait appel au DNCB (dinitrochlorobenzène). Il s’agit d’un acide qu’on applique directement sur la zone touchée pour essayer de provoquer artificiellement une réaction allergique — un peu comme en cas d’intoxication au sumac vénéneux — dans l’espoir de détourner les lymphocytes. L’éruption qui en résulte est parfois extrêmement douloureuse.
  On parle beaucoup également d’application locale d’un produit appelé minoxidil. Il se trouve que ce produit mis au point à l’origine pour traiter l’hypertension a pour effet secondaire de provoquer la pousse des cheveux. Toutefois, à l’instar de la plupart des traitements contre l’alopécie, le taux de réussite s’est avéré décevant. C’est le plus souvent en rapport avec le traitement de la calvitie masculine, non de la pelade, que les médias parlent du minoxidil.
  Il existe au moins 16 produits et traitements différents contre l’alopécie, et chacun d’eux doit être pris ou suivi régulièrement pendant un temps indéterminé. Comme une période de six mois est souvent nécessaire pour se rendre compte si une substance agit ou non, ces traitements peuvent à la fois prendre beaucoup de temps et entraîner des déceptions. Ainsi, il n’existe à ce jour aucun remède véritable à l’alopécie.

Date de dernière mise à jour : 05/07/2021

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Commentaires

  • Patricia GERBAUD
    Bonjour,,

    Suite à l'alopécie universalis qui m'a frappée de plein fouet à une vitesse fulgurante en décembre dernier, à un âge pourtant déjà avancé (en ce qui me concerne le stress ne laisse aucun doute) , j'ai créé une page facebook : https://www.facebook.com/pages/Alop%C3%A9cie-France/171842809656868
    Alopécie France et j'essaie de la faire vivre avec des témoignages ou autres. J'y ai publié différents liens américains et anglais, et j'aimerais qu'elle puisse se développer afin que nous fassions bouger la recherche en France ou en tout cas pour aider les personnes qui en souffrent et ont du mal à s'accepter.

    Je ne sais de quand date ce post, alors si vous êtes intéressé(e)s merci d'y aller.

    A vous lire, merci de ne pas faire appraître mon adresse mail.
    Bien cordialement

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